- LA MERE -
Excellent paragraphe écrit par le grand Victor Hugo, dans son roman "Notre Dame de Paris", que je vais vous faire découvrir, ou redécouvrir, ci-dessous.
"Livre huitième", dans ce roman, partie 5.
# Je ne crois pas qu'il y ait rien au monde de plus riant que les idées qui s'éveillent dans le coeur d'une mère à la vue du petit soulier de son enfant : surtout si c'est le soulier de fête, des dimanches, du baptême ; le soulier brodé jusque sous la semelle ; un soulier avec lequel l'enfant n'a pas encore fait un pas. Ce soulier-là a tant de grâce et de petitesse, il lui est impossible de marcher, que c'est pour la mère comme si elle voyait son enfant.
Elle lui sourit, elle le baise, elle lui parle ; elle se demande s'il peut, en effet, qu'un pied soit si petit ; et l'enfant fût-il absent, il suffit du joli soulier pour lui remettre sous les yeux la douce et fragile créature. Elle croit le voir, elle le voit, tout entier, vivant, joyeux, avec ses mains délicates, sa tête ronde, ses lèvres pures, ses yeux sereins dont le blanc est bleu.
Si c'est l'hiver, il est là, il rampe sur le tapis, il escalade laborieusement un tabouret, et la mère tremble qu'il n'approche du feu. Si c'est l'été, il se traîne dans la cour, dans le jardin, arrache l'herbe d'entre les pavés, regarde naïvement les grands chiens, les grands chevaux, sans peur, joue avec les coquillages, avec les plates-bandes et la terre dans les allées. Tout rit, tout brille, tout joue autour de lui comme lui, jusqu'au souffle d'air et au rayon de soleil qui s'ébattent à l'envi dans les boucles follettes de ses cheveux. Le soulier montre tout cela à la mère, et lui fait fondre le coeur comme le feu une cire. #
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Bien amicalement
Pierre-jean